La BCE doit convaincre le marché que les taux resteront élevés, a déclaré Arnaud de Guilhem Lamy, responsable de la stratégie obligataire euro aggregate chez BNPPAM, dans une interview accordé à l’agence Reuters.
« La BCE a relevé comme anticipé par les observateurs ses taux de 25 points de base (pdb). Pour autant, le discours de sa présidente, Christine Lagarde, a été nettement “faucon” appuyé par des révisions de projections d’inflation en hausse. L’inflation sous-jacente en 2024 a ainsi été revue à la hausse de 0,50 point de pourcentage, tandis qu’elle demeure supérieure à sa cible de 2% en 2025. De fait, les banquiers centraux doivent désormais convaincre les marchés que les taux resteront élevés pour plus longtemps qu’ils ne l’anticipent: la question est moins celle du taux terminal que de la durée pendant laquelle il sera maintenu. C’est ainsi qu’il faut comprendre la déclaration de Christine Lagarde, qui s’est pratiquement engagée à relever de nouveau les taux en juillet, une éventualité pourtant bien anticipée par les observateurs: convaincre les marchés d’aligner leurs vues avec celles de la banque centrale demeure un défi -le forward Ester à 2 ans (reflet du taux directeur anticipé dans deux ans par les marchés) atteint 2,75%. La BCE devrait recourir davantage à ce nouveau cadrage prospectif (“forward guidance”) pour éviter les anticipations de baisses de taux », a-t-il relevé.
Toutefois, la politique monétaire pourrait nuire à la demande sans déclencher de récession, selon l’expert.
« La BCE a beaucoup insisté sur le dynamisme des marchés du travail et des salaires, qu’elle va chercher à stabiliser. Cela ne passera pas nécessairement par une récession: la politique monétaire peut étouffer la demande sans en provoquer une, mais au prix d’une croissance atone. Les projections de la BCE montrent pourtant une croissance presque à son potentiel en 2024 et 2025. Il ne faut pas non plus sous-estimer le retard avec lequel les hausses de taux se transmettent à l’économie -cette transmission devrait être apparente en deuxième partie d’année », a-t-il ajouté.